La propriété intellectuelle et sa valeur pour votre société

date de publication 7 Septembre 2016

Le portefeuille de propriété intellectuelle (« PI ») d’une société en démarrage constitue bien souvent son actif le plus précieux. Les formes de PI qui composent son portefeuille de PI dépendront du secteur d’activité de la société, de son stade de croissance, de même que de ses idées, procédés et produits. Pour préserver et faire croître la valeur d’une société, les fondateurs doivent comprendre les formes de PI qu’elle a créées et qu’elle continuera de créer et voir à leur protection.

Quelles sont les formes de PI composant votre portefeuille de PI?

Vous pourriez commencer par dresser un inventaire de la PI de votre société pour établir quelle forme la PI prend actuellement et pourrait prendre à l’avenir. Puisque chaque catégorie de PI vise un actif légèrement différent et que chacune est assortie de son propre jeu de droits et de protections, il est important que vous distinguiez bien les diverses catégories de PI. Passez en revue chacune des catégories indiquées ci‑après et déterminez si votre société peut détenir ou créer ces formes de PI.

 

Droit d’auteur

Si votre société a créé une « œuvre » créative et originale, cette œuvre peut être protégée en vertu du droit canadien. Les œuvres susceptibles d’être protégées par le droit d’auteur sont notamment les œuvres littéraires, artistiques, dramatiques, visuelles et musicales, les prestations, les enregistrements sonores et certaines formes de télécommunications et de programmes d’ordinateur. Le droit d’auteur comporte le droit exclusif de produire ou de reproduire, d’exécuter ou de représenter la totalité ou une partie importante de l’œuvre, sous une forme matérielle quelconque. Par exemple, votre société peut détenir un droit à l’égard de son logo à titre de création artistique, ce qui comporte le droit exclusif de le produire ou reproduire. Un tiers qui tenterait de créer et de distribuer une copie du logo de votre société violerait le droit d’auteur de celle‑ci.

 

Les œuvres originales sont automatiquement protégées par le droit d’auteur dès leur création, mais vous devriez songer à enregistrer le droit d’auteur et à obtenir un certificat de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. Vous pourrez ensuite utiliser ce certificat comme preuve de propriété si l’œuvre fait ultérieurement l’objet d’un litige. De façon générale, la protection par le droit d’auteur au Canada est offerte du vivant du créateur et durant les 50 années qui suivent son décès, après quoi l’œuvre devient accessible au public.

 

Marques de commerce

Le droit des marques de commerce régit l’utilisation des « marques », qui comprennent les sons, les dessins, les logos, les slogans et les noms de marque (ou marques nominatives) associés aux produits ou aux services particuliers d’une société. Les marques sont utilisées pour distinguer les produits et les services d’une société de ceux des concurrents et constituent au bout du compte les assises de la réputation et de l’achalandage d’une société. Certaines formes de droit d’auteur peuvent également être enregistrées à titre de marque de commerce (p. ex. un logo). Par l’inscription d’une marque de commerce au Canada, l’inscrivant obtient une protection pour cette marque en vertu de la loi ainsi que des droits exclusifs visant son utilisation au Canada durant 15 ans, cette durée étant susceptible de renouvellement. Les sociétés doivent veiller à ce que les tiers ne portent pas atteinte à leurs marques de commerce (p. ex. s’ils utilisent un logo qui est similaire au point de créer de la confusion ou le même slogan pour un produit), et elles doivent également s’assurer ne pas contrefaire l’œuvre d’un tiers.

 

Dessins industriels

Les dessins industriels visent les caractéristiques ou la combinaison de caractéristiques visuelles d’un produit, notamment sa configuration, sa forme, son motif ou ses éléments décoratifs. La forme d’un iPhone d’Apple, une chaise de Charles Eames ou la silhouette particulière d’une Mercedes-Benz sont des exemples de dessins industriels. Comme dans le cas des marques de commerce, les enregistrements de dessins industriels confèrent à l’inscrivant des droits exclusifs à l’égard du dessin pour une durée d’au plus 10 ans au Canada. Pour que la demande soit admissible à l’enregistrement, le dessin doit être original (c.‑à‑d. qu’il ne peut présenter une étroite ressemblance avec un autre dessin). La demande d’enregistrement doit être présentée dans l’année qui suit la publication initiale du dessin. Il est donc recommandé au demandeur de les enregistrer dès que possible. L’enregistrement ne protège que l’apparence du dessin industriel et ne couvre ni son fonctionnement ni son procédé de construction.

 

Brevets

Les brevets protègent les inventions nouvelles, non évidentes et utiles, comme les procédés ou les méthodes (p. ex. des stratégies d’investissement ou un procédé de commerce mobile), des machines (p. ex. une imprimante 3D), des produits, des compositions de matières (p. ex. des médicaments) ou des améliorations nouvelles et utiles apportées à une invention existante. Un brevet confère à l’inventeur et au titulaire de brevet le droit à un monopole sur le marché pour une période définie, en échange du partage de l’invention. Pour obtenir des droits aux termes d’un brevet, l’inventeur doit présenter une demande à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. Les demandes de brevet sont accaparantes et prennent beaucoup de temps comparativement à d’autres formes de protection de la PI. Toutefois, les titulaires peuvent utiliser leurs brevets pour réaliser un profit par l’attribution de licences s’y rapportant ou le vendre comme un autre bien.

 

Si vous croyez que votre société a créé une invention nouvelle et utile susceptible d’être protégée par un brevet, vous devez déposer une demande en temps utile et garder ces inventions complètement secrètes, parce que leur divulgation publique peut empêcher le dépôt d’un brevet. Au Canada et aux États‑Unis, cette règle comporte une exception lorsque la divulgation publique a été effectuée par l’inventeur (ou par une personne qui a appris l’invention directement de l’inventeur) moins d’un an avant le dépôt de la demande.

 

Secrets commerciaux

Un secret commercial concerne une information commerciale confidentielle dont la connaissance a une valeur intrinsèque. Contrairement à un brevet, si cette information secrète est divulguée, il n’existe aucune protection. Il en est ainsi parce que l’information, une fois révélée, ne redevient jamais secrète. Pour cette raison, certaines sociétés préfèrent ne pas partager leur information confidentielle par le dépôt d’un brevet et choisissent plutôt de la garder secrète. La formule de la boisson gazeuse de Coca‑Cola constitue l’exemple le plus connu d’un secret commercial. Cette formule a une valeur en soi, et sa divulgation aurait des répercussions négatives sur l’entreprise de Coca Cola. Étant donné qu’il n’y a pas de processus d’enregistrement, si votre société détient des secrets commerciaux qu’elle souhaite conserver, elle doit s’assurer de protéger cette information par des ententes de non‑divulgation, des ententes et des clauses de confidentialité ainsi que des mesures de sécurité comme le chiffrement de données pour protéger ce secret commercial.

 

Êtes‑vous propriétaire de votre PI?

Ce sera toujours difficile pour vous d’apprendre que votre société n’est pas propriétaire de toute sa PI. Si, par exemple, votre société retient les services d’un entrepreneur pour la concrétisation de votre idée, à moins que le contraire ne soit stipulé dans le contrat, cet entrepreneur pourrait avoir certains droits de propriété à l’égard du travail qu’il a réalisé. Par conséquent, vous devriez suivre les pratiques exemplaires qui consistent à traiter les droits de propriété dès le départ, notamment en prévoyant une cession de PI dans la convention conclue avec l’entrepreneur ou en préparant un document plus vaste pour la protection des intérêts de la société, dans lequel vous pourriez également inclure des clauses de confidentialité et de non‑concurrence. Par l’utilisation de ce type de convention, votre société évitera que des tiers revendiquent ultérieurement des droits à l’égard de sa PI.

 

Pourquoi la PI est cruciale pour les sociétés en démarrage

Pour les sociétés émergentes qui cherchent à obtenir un financement extérieur, un portefeuille de PI bien étoffé constitue un attrait important. Tout investisseur, qu’il s’agisse ou non de capital de risque, voudra dès le départ savoir si l’entreprise en démarrage est réellement propriétaire de la PI qui forme les assises de l’entreprise. Si la société n’est pas en mesure d’établir qu’elle détient la totalité des droits visant sa PI, les investisseurs potentiels pourraient très rapidement se tourner vers une autre entreprise dans laquelle investir, en particulier si elle détient sa PI. En plus de vous assurer que la société est propriétaire de sa PI et l’a protégée, vous devez éviter de contrefaire la PI d’un tiers, car votre société pourrait s’exposer à des actions en contrefaçon interminables et coûteuses.

 

Organisation de la protection de la PI

Pour améliorer l’emprise de votre société sur son portefeuille de PI, vous devriez dresser un inventaire de la PI (soit vous‑même, de façon informelle ou avec l’aide d’un conseiller) pour évaluer la situation actuelle de votre société. Ensuite, vous devez établir si votre société est propriétaire de l’ensemble de sa PI et, dans la négative, comment elle peut obtenir la cession des droits s’y rapportant. Enfin, vous devez examiner dans quelle mesure la PI de la société est protégée par des enregistrements, des contrats d’emploi ou des ententes de non‑divulgation et mettre en place une procédure qui assurera une protection adéquate à l’avenir.

 

***

Compte tenu de la grande diversité des droits en matière de PI offerts aux entreprises et aux particuliers au Canada, nous vous recommandons de vous adresser à votre conseiller juridique ou à votre agent de marques de commerce ou de brevets avant de prendre des mesures pour la protection de votre PI.

par Morgan McDonald et Brandon Deans, stagiaire temporaire